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La plus grande archive d’Internet attaquée par des mammouths de l’édition

La plus grande archive d’Internet attaquée par des mammouths de l’édition

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(c) iStock photos

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Par Konbini

Publié le

Sa bibliothèque nationale d'urgence a même dû prendre fin prématurément.

Internet Archive est une organisation qui œuvre depuis 1990 pour l’accessibilité et la sauvegarde des informations publiées sur Internet. Sa mission est de trier et d’archiver la plus grande quantité possible de textes, images et vidéos disponibles sur le Web, pour les mettre à disposition de tous les utilisateurs gratuitement.

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Depuis quelques années, son catalogue s’est étendu à d’autres secteurs, comme les jeux vidéo, les films ou encore les livres. Cette immense bibliothèque dématérialisée répertorie actuellement 446 milliards de pages Internet, 26 millions de livres, 11 millions de fichiers audio, 6 millions de vidéos, 15 000 jeux vidéo, plus de 200 000 concerts et même 565 000 licences de logiciels.

Cette bibliothèque d’Alexandrie 2.0 rencontre toutefois beaucoup de détracteurs. Comme le rapporte The Verge, en mars dernier, l’Authors Guild, la plus grande association professionnelle d’écrivains aux États-Unis, accusait Internet Archives d’agir “comme un site de piratage” et de violer les droits d’auteur à tour de bras.

Dans le même temps, alors qu’un tiers de l’humanité se cloîtrait chez elle, Internet Archive lançait son projet de bibliothèque nationale d’urgence (ou National Emergency Library), pour pallier la fermeture des écoles, des universités et des bibliothèques partout dans le monde.

Revers de fortune : le 16 juin, deux semaines avant la fin de l’opération, l’organisation annonce dans un communiqué qu’elle doit mettre fin à son programme prématurément, après avoir reçu les menaces de poursuite de quatre éditeurs majeurs : Hachette, Penguin Random House, Wiley et HarperCollins.

Le droit à s’informer contre le droit à disposer

Les grands de ce monde semblent en vouloir aux archives d’Internet. Pourtant, pour éviter ce genre de déboires judiciaires, l’organisation avait choisi de prêter ses livres – à raison d’un exemplaire numérique par lecteur – plutôt que de les offrir. Ainsi, pendant le confinement, 1,3 million d’ouvrages ont été échangés au nez et à la barbe des ayants droit.

Dans leur plainte déposée le 1er juin 2020, les éditeurs affirment sans nuance qu’Internet Archive serait “impliquée dans une vaste violation délibérée du droit d’auteur”. Côté accusé, on rétorque que l’attaque est beaucoup plus profonde que cette affaire :

“Cette plainte s’attaque au concept, pour une bibliothèque, de posséder et de prêter des livres numériques, remettant en cause l’idée même de ce qu’est une bibliothèque à l’ère numérique.”

Pour l’institution, se voir contrainte de retirer son service de bibliothèque d’urgence aussi facilement lui rappelle combien la préservation de notre histoire numérique est difficile. De surcroît, une grande partie du catalogue disponible sur Internet Archives n’existe pas ailleurs et a été bâtie avec l’aide tout à fait légale de sponsors, donateurs et lobbyistes de la culture.

Dans le même communiqué, Internet Archive a exhorté les éditeurs à cesser ces “assauts coûteux” et a, par ailleurs, assuré avoir reçu des centaines de témoignages de soutien de la part de libraires, d’auteurs et de lecteurs, les remerciant d’avoir mis en place ce service d’urgence.

“Nous sommes désormais tous connectés à Internet, mais aussi noyés sous la désinformation – qu’il faut combattre en rendant les livres plus accessibles que jamais. Pour y arriver, nous devrons autant collaborer avec les bibliothèques, les auteurs, les librairies que les éditeurs”, lance enfin l’organisation, comme un dernier message d’espoir.